Février

Vendredi 4 février
Péronne dans la Somme. Je sors du Conseil de Prud'hommes où je figurais comme représentant légal de la seru contre Valérie F. et d'Odilivre contre Catherine L. Affaires de non paiement de salaires auxquelles j'ai opposé l'entreprise de démolitions menée par les intéressées et Martine Dugant contre les sociétés sabordées. Convoqué à 14h30, mes deux affaires n'ont été exposées qu'à partir de 16 heures. Même en province les salles d'audience bouchonnent.
Avant nous, de talentueux ou saoulants avocats donnent vie à de banaux conflits employeur-salarié. Dans le lot des présents un employé cul terreux, truculent par excellence, nous offre un spectacle digne des plus bouffonnes farces de mauvais boulevards. Grommelant dans son double lors de la plaidoirie de son représentant, il se lève de temps à autre et braille des « Maître ! » au Président roupillant et lance à la toute jeune avocate de la partie défenderesse : « Vos preuves, vous pouvez vous asseoir dessus ! ».

Mon état, stationnaire ? Plus vraiment. Je ne passe plus seulement mes journées à gérer l'anéantissement progressif. Une nouvelle perspective constructrice s'ouvre à moi. Je repars à la Bibliothèque nationale, l'âme ethnologue, pour exhumer des œuvres d'érudits traitant des localités sous la Révolution. Du projet embryonnaire, je dois tout entreprendre : enquête et prise de contact avec mairie, libraires, associations culturelles, presse et sponsorisation. Variété d'actions passionnantes. J'espère que, depuis mon Purgatoire, je saurais empoigner la perche que Heïm m'a tendue.

Dimanche 5 février
Au s'éloigne, mon Purgatoire se rapproche, et tout ça grâce à la SNCF.
Samedi, avec Monique, Alice, Hermione et Karl, poursuite du déménagement d'un château l'autre. Débarrassage de la Maison de Garde, notamment la pièce poussiéreuse et encombrée de vieux meubles, archives, crottes de rats et insectes morts ou fuyants. Les biscottos chauffent toute la journée. L'esprit de dérision des situations, vif au début, se calme nettement à l'approche grandissante de la fatigue.
Le soir, virée avec Karl à La Loco de Saint-Quentin. Toujours aussi curieux d'observer les relations entretenues par de jeunes gens comme nous dans le cadre ludique et superficiel, qui compense souvent une misère sexuelle, des boîtes de nuit.
Le cromagnonnage, concentré des pulsions et des comportements primaires de l'homo sapiens sapiens, trouve ici un terrain de prédilection.
Ne se fier à aucune des relations apparentes qui s'ébauchent, n'accorder aucun crédit à toute marque d'intérêt que l'on semble nous porter sous peine de se voir, l'instant d'après, ratatiné à la plus inconsistante figure égarée dans le malodorant grouillement nocturne.
Avant tout, pour la Pute à Trou, donner sa viande à renifler dans une parure excitante. Certes, il subsiste de saines demoiselles, mais le milieu s'incruste au détour d'un déhanchement et, finalement, elles s’accommodent des dérives microcosmiques.

Pour la Bite Molle la partie est plus délicate, d'autant plus quand elle n'est pas accompagnée de sa Pute à domicile, mais seulement d'autres Bites Molles. Le charme seul ne paie pas pour le mâle. Il lui faut un sens de l'initiative et du contact de bon aloi pour espérer dépasser le cercle bêtifiant de ses rivaux.
La Pute à Trou, au petit genre bien placé, à l'atout mis en valeur, règne sans peine dans ce sombre royaume de l'illusoire et de l'illusion. Très vite une nuée de Bites Molles gravite autour de la longue paire de jambes bien enveloppée de résille ou de nylon noir, du popotin charnu à souhait qui se trémousse pour échauffer l'instinct reproducteur du pauvre jobard suant, de la poitrine bombée qui suit le rythme, tétons en avant, rondeurs alléchantes.
Un vrai délice décadent que ce sous-sol à décibels.


Jeudi 10 février
1h33 du matin. Pas sommeil, à l'horizontal dans mon Purgatoire. C'est en ces moments de sérénité, dans le silence nocturne, que je peux m'exercer à quelques analyses fondamentales.
XXe siècle dans sa dernière décennie, quelques milliers d'années pour l'histoire humaine et rien ne semble évoluer dans l'instinct comportemental de mes contemporains.

Samedi 12 février
2h43 du matin. Plutôt brèves mes analyses fondamentales, hé ! hé ! Le polochon aura eu raison sans mal de mes pompeuses réflexions en germe.
Cette nuit s'annonce plus inspiratrice pour dessiner quelques lettres romaines sur ces petits carreaux de papier.
Marchant fréquemment dans la capitale, je suis enthousiasmé par la quantité de jolies demoiselles, émouvantes par leurs jolis traits, qui existent dans ce monde. Et dire qu'une seule d'entre elles pourrait me rendre le plus heureux des hommes, et foudroyer ma pesante solitude. Je n'ai pas encore la talentueuse goujaterie pour les enivrer au milieu de l'asphalte.
Le bougre n'a pas résisté longtemps aux charmes des songes. J'en ai raté mon train de ce matin pour Amiens.
Dernier tour de piste du déménagement d'un château l'autre. Après 17 ans d'occupation par Heïm et sa mesnie, la demeure va abriter de plus conventionnelles existences. Hermione et Alice investissent la maison de Julie, Monique débarque au château d'Au, Karl attend de se rouler dans les étendues de l'armée nationale. Eclatement rendu nécessaire par les contingences matérielles et géographiques. De mon Purgatoire, je ne fais pas fier.
Ce soir, reprise du Tchou-Tchou en sens inverse pour retrouver ma décadente Lutèce. Au bout du quai doit m'attendre une jeune femme d'une trentaine d'années connue dans un recoin de Bibliothèque nationale, à la belle époque de mes recherches historiques pour la seru. Jeune étudiant en droit à la Sorbonne, je trouvais chez elle une espèce de confrère, puisqu’elle préparait un doctorat sur l'influence de l'Encyclopédie dans les développements révolution­naires.
Exilée à Lyon, elle revient dans la capitale pour le week-end. Nous ne pouvions manquer nos amicales retrouvailles. Je l'accueillerai pour la nuit dans mon Purgatoire, section chambre d'ami.
La presse reprend du service dans les contrées bleues-kakies des forces onusiennes. L'OTAN va jouer les tireurs d'oreilles si, dans dix jours, les méchants Serbes n'ont pas promené leur artillerie lourde à 20 km de l'ensanglantée Sarajevo. Il était temps que nous grognions.
Entre les intégrismes religieux et les guérillas de clans, nous sommes encore, à l'aube du pâle an 2 000, englués dans les comportements les plus archaïques. Quand donc l'intelligence humaine évoluera-t-elle un chouïa, juste pour ne plus nous offrir la terrible tragédie quotidienne de corps écharpés, de tripes à l'air, de massacres sans cesse recommencés ?
Sisyphe, la gueule écrasée par son putain de caillou, n'a qu'à bien se tenir.
18h20. En partance pour le retour. Entre chien et loup la masse céleste rechigne à se transmuer en firmament, s'étirant vers l'horizon en de rosés pastels, le tout coiffé par quelques stratus vagabonds.
Les Guignols de l'info sur Canal + prêtent des pouvoirs anesthésiants et soporifiques au Premier Ministre. Force est de constater que si la politique internationale émoustille les plus endurcis de nos analystes, les affaires intérieures coulent au fil des réformettes, sans de vagues trop faire. Ci-gît la France, en plein redressement national. Ce n'est plus une cohabitation, mais une douce fusion. Si cela peut contribuer à fournir un peu de tonus à notre hexagone et à ses satellites, encourageons l'insolite union du chenu socialiste et du gaulliste onctueux.
Les remous ont tellement le relief d'un encéphalogramme de cadavre, que la presse politique de gauche donne dans le gâtisme événementiel : « Et si Fanfan se représentait une troisième fois aux élections ? ». La question qui tue ! Arrg, non ! non ! pitié, pas le Tonton qui fait peur.
Enfin, de qui se moque-t-on ? Et pourquoi pas établir la branche mitterrandiste pour incarner la souveraineté française. Nous rentrerions alors dans le XXIe siècle mené par l'apparatchik de la Quatrième République regonflé à coups de perfusions avant ses rares sorties ? N'ont vraiment rien à foutre, ces journalistes !

Lundi 14 février
Balladur, notre boute-en-train de Premier Ministre, est venu ce soir nous transmettre son pétillement naturel grâce à L'heure de vérité sur France 2. J'ai pu vérifier sur pièce ses effets soporifiques. Après une demie heure de sermons sages et de souhaits mesurés, sa voix me devint inintelligible et sa suavité paternelle m'alourdit irrésistiblement les paupières. Et pourtant, combien étaient graves et fondamentaux les sujets abordés : chômage de la France, ultimatum de l'otan, sauvetage des retraites... Tout cela justifie bien un déplacement en bon uniforme. Balladur dur, oui !
A noter mes retrouvailles avec Nadette de la bn. Charmante et pétillante jeune femme qui est restée faire dodo chez moi samedi soir, après m'avoir fait découvrir un pittoresque restaurant russe rue Letellier dans le 15e. Les parfums de vodka, décuplés par nos nombreux cul-sec, m'ont chatouillé les sens comme une révélation.
Le caractère de Nadette correspond pour beaucoup à ce que j'apprécie chez une femme : l'authenticité, la joie de vivre, la légèreté quand il faut, le sérieux au bon moment, l'humour sans retenue, la générosité du cœur, l'élan vers l'autre, la complicité amicale, la douceur attentive... entre autres vertus. Nous nous reverrons très bientôt.

Mercredi 16 février
Au domaine des bonnes affaires j'aurais pu être sacré empereur. Malgré les difficultés financières du moment, je ne pouvais laisser passer l'occasion : le dictionnaire en cinq volumes d'Emile Littré, édition de 1875, en bon état, pour... 800 F. Moi qui ne croyait trouver ce joyaux que dans des ventes aux enchères, voilà qu'on me l'offrait sur un plateau. Je le donnerai très prochainement à Heïm qui le désire depuis des décennies.
Reçu ce jour une lettre de Nadette M. la pétillante, à qui j'ai répondu immédiatement. Notre relation épistolaire commence sur les chapeaux de roues. Elle m'appelle ce soir pour prendre des nouvelles et m'informer du non déclenchement de mon répondeur professionnel, sur lequel elle voulait enregistrer une bêtise de son cru. Je crois que nous sommes vraiment faits pour être des amis durables, dans la folie comme dans la réflexion.
Vu rapidement l'écrivain Sollers dans l'émission de Gildas sur Canal +. Il semblait se réjouir de sa supériorité intellectuelle, jusqu'à paraître imbuvable pour le commun.

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Paris, le 16 février 1994
Ithyphallique Nadette,
Lorsque les Gros Niqueurs ont décidé d’investir le service Minitel rose cracra qui nous résistait, nous savions à quel type de population nous avions affaire : des êtres affaissés par le renoncement, une perdition existentielle, la déliquescence des rapports, en un mot, des mous. La seule chose qui pointait chez ces pauvres gars en mal de fifilles, vous l’avez deviné... Mieux qu’un non-sens, mon expression, un peu hardie et détonante, est l’illustration de la dysharmonie maladive de ces minitellistes première génération. Nous avons, à notre niveau, essayé de changer cette nature.
En face de moi, le trésor de 1875 en cinq volumes de notre Émile préféré. Beaux et vieux, ces tomes (et Jerry bien sûr !) appartenaient à un journaliste dans la mouise, acculé à vendre mobilier et immobilier bourgeois suite à l’effondrement du journal informatique qu’il avait créé. Je n’ai pas eu l’indécence de négocier le prix de vente du Littré, déjà largement donné. Nous sommes tous sur une lame de rasoir et, l’équilibre rompu, tout s’écroule. Voilà ce que m’inspirait le pauvre homme.
Atla, atla, les journées défilent et je n’ai pas eu un instant pour me consacrer à nos starmaniaques places.
Cela m’enchante de venir déblatérer mes inepties dans votre lycée. J’espère que vous pourrez bientôt m’indiquer les thèmes à aborder.
Je tenais à vous remercier pour votre agréable et enchanteresse compagnie, et j’apprécierais que nous multipliions ces vagabondages parisiens, chauffés ou non par une vodka aux douze senteurs.
N’hésitez pas à m’écrire depuis votre refuge écossais.
Toujours votre, très amicalement.
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Paris, le 18 février 1994
Chère poétesse culinaire,
Amie du vers parfumé,
Les Petits Tarés Teigneux (traduisez PTT) lyonnais ont au moins autant de mérite que ceux de Lutèce. Grâce à leur professionnalisme timbré, je peux salir, ce jour, mon beau papier blanc pour répondre à votre pétillante missive.
Votre invitation à venir croquer quelque boustifaille en votre compagnie ne restera pas rime morte. Je vous fais la promesse d’apporter mon bavoir grande contenance et de laisser mes sabots picards au placard.
Mon calembour à ras du Hannah & Barbera ne vous a pas trop effrayé, j’espère. Pardonnez à ce grand benêt tout juste émergé du pâté de sable. « Pas la férule m’dame ! j’recommenc’rais p’us ! »
Stop la légèreté infantile du prout-caca-boudin ! La Question embrasant tout neurone sain est enfin sortie de la plus mignonne des billes bleues : n’est-on que le produit de ce qu’on a vécu ? Ouf. Tout dépend si l’on a préalablement trempé dans un jus qui pue ou dans une fragrance rosée. Pour déconner un chouïa moins : la puissance génétique est impressionnante et nombre d’événements que l’on a à vivre seront vécus en fonction, certes, de facteurs extérieurs, mais aussi et surtout au regard de notre propre instinct génétique.
Phase illustratrice : si l’on reçoit un gros caillou sur la tronche, tombé par hasard ou par nécessité, peu importe la génétique. Si, en revanche, on voit le pauvre bougre écrabouillé par la caillasse, notre réaction, donc futur vécu, dépendra pour l’essentiel de notre acide désoxyribonucléique.
Voilà à quoi sert notre relation épistolaire en germe, et qui ne tache pas : à découvrir toutes nos facettes, dans la sincérité et l’humour.
A bientôt dans ma bal.
Votre attentif « luron ».
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Dimanche 20 février
Les relations épistolaires avec Nadette M. vont bon train. Reçu dès vendredi une nouvelle lettre d'une page et demie de la nouvellement chercheuse au cnrs. Comme galvanisé par la vigueur revigorante de ses propos, je me suis mis tout de go devant ma blanche feuille et, plume en avant, j'ai parcouru à la vitesse de l'encre qui sèche les horizontalités offertes à mon inspiration vagabonde.
Coup de grisou au siège de Canal + : départ bruyant du PDG fondateur André Rousselet, quelques mois avant de pouvoir souffler les dix bougies d'une des plus prodigieuses réussites audiovisuelles. Véritable tragédie comico-politico-économico-médiatique, ok ! ok !, le septuagénaire ami de Fanfan n'a pas gobé l'entrée en force de nouveaux actionnaires dans le capital de la chaîne, vieilles souches ennemies, tel France Telecom. Les guignolades ont, pour une fois, comme scène l'antre sacré et nourricier des turbulents dénonciateurs des tares et méfaits qui prolifèrent. Santé et bienvenu au club !
Départ en trombe du château d'Au. pour rejoindre la gare de Laon. Le J5 à fond la caisse sur les sinuosités de l'asphalte glacé. Alentour, les étendues enneigées embellissent les domaines agricoles.
Cet après-midi, je retrouve, en furetant dans mes cartons au grenier, quelques textes écrits à l'époque de la guerre du Golfe. Ces chroniques avaient été pondues après la publication du recueil Les gros niqueurs.
Je les note ici, pour qu'elles soient en sécurité :


La Solution vénale
le 02 novembre 1990


Le chambard cultivé depuis tout juste trois mois autour des méfaits du grand méchant nouvelle cuvée mérite quelques petites mises au poing.
Saddam Hussein a certes tous les culots. Puissant et moustachu comme un Staline, rapide et déterminé comme un Hitler, S.H. s'offre en archétype du démon de synthèse.
Si des pilotes israéliens l'explosaient comme une centrale, nucléaire de partout, je n'irais pas chialer sur sa bouillie.
Le monstre baasiste a pourtant une tripotée d'excuses.
Une guerre contre des Iraniens fanas épuiserait Nabuchodonosor lui-même, même nourri à la poudre occidentale.
« N'avait qu'à pas commencer ! » me lance un contradicteur perçant de souche.
« N'empêche que l'Iran planchait sérieusement sur le destroy le plus insidieux à commettre dans la région » je contrecarre avec un naturel à vous couper le détroit d'Ormuz.
Le recul panoramique rend grotesque la guerre Iran-Irak : pénétrations successives de chacun, ballet belliqueux des offensives-surprises, des offensives-éclairs et des contre-offensives revanchardes ; bap­têmes poétiques des opérations guerrières, depuis les Six Aurores lancées par les troufions de l'Imam Khomeiny, jusqu'aux Guerres des marais ou... des pétroliers, eh oui déjà ! ; les malheureuses tentatives de réconciliation d'Olof Palme, petit onusien encombré de bons offices.
L'hygiène des bains de sang s'impose par cycle.
Cette guerre par procuration a largement servi les deux Grands cantonnés dans le fla-fla diplomatique. Plus besoin n'est de déblatérer sur les ventes d'armes qui s'opérèrent avec la bienveillance des dirigeants soucieux de concilier principes internationaux pour la bonne figure et gains substantiels pour plus bas, du côté des bourses. Sujet éculé... d'enculés si j'osais ! La France le connaît bien.
L'Irak a payé de son peuple. Le million d'hommes au pied de Saddam ne semble d'ailleurs doué que pour se faire faucher sur les champs de bataille : il suffit de voir l'absence de révolte populaire à l'annonce de la réconciliation avec l'Iran. On est pourtant là en pleine histoire de brindezingue en phase delirium ! L'oppression par la milice irakienne ? La collaboration des oppressés n'arrange rien.
L'Irak s'est battu et les autres pays arabes ont négligé de lui renvoyer le baril. Pays ruiné, l'instinct de son maître ne se trompe pas d'objectif : le Koweït est une tirelire, pas seulement lourde de gros-plein-de-soupe, et assure un débouché direct dans le Golfe.
Le fric est bien la raison d'être du Koweït. Ne parlons pas d'Etat, et encore moins de nation. Qu'on nous prenne pour de pauvres gabiers de poulaines paumés sur un Clémenceau ne m'étonnerait pas : la belle leçon d'hypocrisie que de prétendre appliquer le droit international à cette protubérance artificielle.
Œuvre du colonisateur anglais, le Koweït est déclaré indépendant en juin 1961 : l'Irak le revendique tout de go comme « faisant partie intégrante » du territoire national. Le contentieux est donc aussi vieux que le croupion juteux lui-même.
Dès l'annonce de l'invasion, les Etats-Unis, telle la pute invoquant la vertu ou Mitterrand la morale, accaparent le droit international pour se tailler l'étoffe d'un justicier du globe. Fi de leurs antécédents et de leur je-m'en-foutisme pour l'application des règles consacrées par l'onu. Bush gronde, sûr de son fait, les autres suivent.
Si certaines motivations du branle-bas de combat nous échappent, les intérêts apparents puent assez pour suspecter la réaction internationale de n'être nullement fondée sur de gueulantes valeurs ressassées à grands renforts de médias.
La menace pour les autres pays arabes ? Sur le papier l'addition des potentialités militaires des seules Arabie Saoudite, Egypte, Emirats et Syrie dépassent pour les armes et frôlent pour les hommes celles de l'Irak. Sans motivation ni détermination évidemment...
La place artificielle de certains dirigeants arabes, à la semelle des acheteurs de pétrole, pousse les populations vers celui qui a osé défier les colonisateurs économiques. Danger il y a, oui, mais pour les affairistes.
C'est l'affaire des gros sous, du pouvoir et des boules de gomme.
La crampe pointe à l'horizon. J'arrête là mon compte-gerbé de ces guignolades.


Ci-gît pour rire


Si les vapeurs hivernales transissent le pays, mon fignard exhale lui un 37°2 du tonnerre. Beineix peut aller crever dans son caniveau.
Pas de fulminations enfiévrées pour ce soir. Le temps d'une lune, je délaisse les tréfonds parisiens et leurs pue-la-mort.
Dans le coton jusqu'aux roseaux, j'affiche une mine des plus grises en remontant à la surface. La respiration telle une traînarde de grand chemin, la toux bruyante qui achève une gorge en lambeaux, le pas claquant sur un rythme de fuite, j'infiltre la brume sans peine, les pores tout juste agacés.
Rien ne tente mes pensées. L'actualité, bric et broc des chiasses mondiales, n'active plus chez moi d'urticaire à fleur de nerf, de cette rage à piler ceux qui encrassent la vie. Je dois couver le blasement de mes dégoûts, ou un chtuc de la comac déprime.
Guerres et paix se trament dans des sphères étrangères ; Thatcher laisse tomber sa cotte sans pour autant se destiner aux mailles à l'endroit et à l'envers ; Bez baisé ! refrain du jour sur le zinc du bistrot de gros rouge.
Tout ça ne m'inspire qu'un gros reniflement.
L'emprise morose me tenaille. Actions à mener, pensées à diffuser : cela ne vaut jamais que pour la conscience que l'on veut avoir de soi-même.
Sonder son nombril soulage l'égo. Freud ne l'aurait pas mieux dit.


Les Étrennes de Fanfan
(Ecrit entre Noël 90 et le jour de l'an 91)


Je profite de cet entre-deux fêtes pour changer de ton. Les victuailles risquent de mal passer pour l'an nouveau, mais je ne peux rester de marbre, au chaud sous les cotillons.
Fanfan mité nous concocte des étrennes sur l'air des chairs écharpées. Une paye qu'on l'attendait, notre nouveau va-t-en-guerre socialiste.
Si tous les potes de Carpentras et d'ailleurs pouvaient se foutre la main dans la gueule.
Toutes ces années d'humanisme gluant, de tolérance matraquée, d'appels liturgiques au dialogue n'auront servi qu'à une chose : après une décennie de pouvoir pépère, le vieux Fanfan, au passé pas toujours transparent, peut décider en conscience du destin de notre pays et de la vie de millions de jeunes. Que l'accomplissement démocratique se fasse...
Ce qui se trame dans le Golfe ne nous concerne en rien.
Pour Fanfan la rose, l'entrée en guerre de la France sera motivée et limitée par le Droit international. Qui peut croire que le belliqueux Bush ait de si bonnes intentions ? Le Président américain nous démontrera que ces prétendus principes mondiaux se résument à la loi du plus fort.
S’il s'agit de faire respecter un certain nombre de règles érigées comme fondamentales, notre Président peut envoyer immédiatement ses 58 millions de concitoyens combattre pour la bonne cause, à commencer contre la totalité des pays du Proche-Orient, Israël et les Etats-Unis eux-mêmes. Je me demande même s'il ne devrait pas envoyer un petit commando nettoyer ses propres rangs.
Imaginons que des centaines de milliers d'hommes finissent charognes dans les sables arabes. Nos dirigeants auront l'air fin d'aller justifier la boucherie par quelques fumeux principes face au plus élémentaire d'entre eux : le droit à la vie. La seule dignité qui restera à François Mitterrand sera alors de se loger une balle au fond de la gorge. Souhaitons que cela n'arrive jamais.
Combattre se fait pour de saines causes, comme défendre son pays face à l'envahisseur, mais certainement pas pour aller libérer un territoire étatisé pour de seuls intérêts stratégiques et financiers.
A ce prix, aucune légalité ne peut obliger des jeunes gens à goûter aux atrocités du casse-pipe.
Que les soldats de métier et les volontaires aillent bouffer du méchant arabe : devoir pour les uns, droit pour les autres.
Mais réquisitionner des vies humaines, par un effroyable retour au temps de la chair à canon, serait là un abus de pouvoir impardonnable.
Monsieur le Président, ne suivez pas l'exemple des Etats-Unis et de son croupion anglais.


La Loi de la Guerre


Pour un peu, j'allais manquer à mon sacerdoce de gros niqueur. La guerre du Golfe fête déjà ses 26 jours d'existence, sous forme de pétarade aérienne, et je n'ai pas trouver un brin de temps pour broncher.
La faute à ma gloutonnerie d'informations : j'ai laissé se sédimenter la maigre pitance quotidienne sans pouvoir l'épurer de ses commentaires en forme d'aérophagie frileuse.
La guerre du Golfe est le révélateur d'une bien pitoyable humanité.
Dramatique, le Gong onusien, fixé par une grotesque escroquerie morale que de Cuellar ne tardera pas à pressentir, a paré la future barbarie conventionnelle des Alliés de la légalité internationale.
Mes premières pensées, malgré un anti-humanisme croissant (ou une misanthropie galopante comme on veut), vont aux innocentes victimes des cieux explosifs, notamment aux civils irakiens, israéliens et saoudiens.
Encore une fois, c'est la masse de soldats tués qui risque d'émouvoir les peuples de nos molles démocraties, et d'attiser la passion haineuse et déterminée au massacre chez les accrocs de l'Islam, les extrémistes bien entendu.
Tant qu'ils se cantonnent à la voie des airs, les alliés peuvent faire croire à une opération de gentlemen, une guerre en gants blancs pour ainsi dire.
Sitôt le sang abondamment répandu dans nos rangs, et la loi de la guerre imposera ses terribles usages.
Le malheur est pour l'instant focalisé sur les quelques grandes villes irakiennes bombardées et sur la famille des scudés et des militaires tués. (L'exemple des sept marines victimes de leur propre missile est d'un comique sordide.)
L'horreur, telle qu'elle sera retransmise par les médias, si tant est qu'ils en aient les moyens, reste encore à venir.
Les motifs de ce conflit n'ont rien de reluisants et ne méritent certainement pas le sacrifice d'êtres humains. Pensez à la petite France pour laquelle Mitterrand prétend au rang de grande puissance ! 1 % des raids aériens, 15 000 hommes sur 700 000 : nos soldats vont se faire massacrer pour de la symbolique. On aurait pu se limiter à l'envoi de notre vieux Fanfan dans les sables arabes. Superbe qu'il aurait été avec son petit baluchon plein des poussières du Soldat inconnu.
Le bâillonnement des médias, s'il semble nécessaire aux dirigeants politiques et militaires, n'en n'est pas moins inquiétant pour le contenu de ce qui fera l'histoire dans 50 ans. Les principes avancés ici ou là se réduiront à la seule charité chrétienne des usa lors des négociations d'après-guerre.
Si de simples opérations aériennes s'offrent avec une telle opacité, notamment quant à leurs résultats, imaginons la confusion hystérique qui régnera lors des combats terrestres. La bataille de Khafji en est la piteuse illustration.
Ainsi naît, par compensation, le terreau pour les rumeurs de toutes sortes qui hantent les rédactions et qui, si l'on n'y prend pas garde, passeront bientôt pour des vérités historiques.
Bush, son Ours blanchâtre et son chef d'état-major interarmes s’attellent à faire lâcher prise à la forte bête.
Si l'envie prend l'Emir Jaber al-Ahmad al-Sabah d'aller régner dans les hautes sphères de son territoire, nous pouvons l'y aider par un grand coup de latte dans le grassouillet : les airs du Koweït sont libres.
Pour le reste, puisqu'on se refuse au nettoyage atomique, il faudra engager une guerre bilatérale, la charnelle qui tue à portée de mains. Bush atteindra alors le pouvoir délétère, géniteur, par Irakiens interposés, de boys étripés. Vaste programme économique !
Et Saddam Hussein là-dedans ?
Sanguinaire comme tout tyran qui se respecte, cela fait plus d'une décennie qu'il exerce ses talents. Implanter le baassisme dans un pays où la majorité la population est chiite (comme celle d'Iran) cela ne peut se faire dans la guimauve.
Saddam doit se faire respecter et imposer ses vues : la détermination dans l'horreur est la seule voie qu'il connaisse.
N'empêche, la réussite est complète et ferait baver plus d'un dirigeant au pet démoucratique : le 13 novembre 1982, quatre millions d'Irakiens envahissent les rues pour soutenir son régime.
Le soutien, hier, des alliés dans sa lutte contre l'Iran, comme un catalyseur des ardeurs islamiques, ne peut aujourd’hui que le renforcer dans ses pratiques.
L'intelligence se conciliant facilement avec une tyrannie plébiscitée, Saddam Hussein comprend ce qui fait la force des Perses : la galvanisation au combat par le nationalisme et la religion. De là, sa stratégie actuelle : se limiter aux à-coups militaires en attendant le corps à corps. De plus, pourquoi se risquer à de grandes offensives terrestres, vouées à l'anéantissement par l'aviation des alliés, lorsqu'un simple Scud lancé sur Israël suffit à le sacraliser aux yeux des arabes et à lui offrir une couverture médiatique mondiale ?
Ne doutons pas que l'histoire manichéenne made in Occident lui fera une place d'honneur parmi ses démons. Le monde arabe, lui, portera longtemps Saddam dans son cœur, et il restera une figure essentielle alors que plus un américain moyen ne saura mettre une fonction sur le patronyme Bush.
Je divague, je divague...

Dresde in the Gulf

A moins d'une résurrection des Irakiens martyrs, l'opération Gambettes du désert n'aura eu qu'une naissance crépusculaire. Le silence, chargé comme une langue de bois, surplombe désormais le champ de bataille.
Le plus désolant dans cet épilogue sanglant : les Bush, Major et Mitterrand, trio drapé dans une torchonneuse légalité, vont s'essayer à l'arrivisme infatué des vainqueurs.
Saint Mitterrand ne manque pas de nous prodiguer une fois de plus la bonne parole. Les sables foulés lui dérouillent les maxillaires. Frisant l'agressivité virile avec son quarteron de journalistes black-outés, il refoule sans ambages les questions tout juste taquines.
La belle affaire que ses litanies en forme de radotage essoufflé. Dans l'histoire comme un larron décati, il tente de nous vaseliner l'ordre du jour de son maître Bush : la peau de Saddam.
Le dopage médiatique n'a pas empêché la liquéfaction des troupes irakiennes. Face à l'acharnement des coalisés, le grand Saddam n'aura mené qu'une lutte balbutiée. Le plus féroce tueur d'Arabes ? Bush sans aucun doute : près de 100 000 morts et blessés selon les premières estimations. Destruction et humiliation : les gardiens du droit ont une haute idée de la justice.
Attendons les négociations d'après-guerre pour avoir les idées plus nettes. Les principes de papier mâché laisseront place aux intérêts vite déçus. On aura détruit un pays et meurtrit un peuple sans prendre garde à l'équilibre de la région. Le pétrole en promotion, le fantoche Koweït plus fortifié que jamais, les extrémistes retrouvant les voies terroristes après un instant d'abattement... et Allah seul sait quelles surprises encore.
Le carnage évité dans nos rangs ne change nullement la mixture glauque de nos dirigeants. La victoire, évidemment attendue, ne doit pas occulter la sale démarche du clan anti-Saddam. Si certaines prévisions pessimistes ne se sont pas réalisées, l'humanité vient tout de même de prendre un mauvais coup derrière l'oreille.

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Paris, le 21 février 1994
Chère Sabrina,
Les semaines défilent et mon précieux ouvrage sur les Vosges, que je dois convoyer jusqu'à Epinal, est toujours retenu en Tchécoslovaquie. Par la même, ma visite dans les profondeurs nancéiennes n’a pu avoir lieu. Une petite lueur de libération de l’ouvrage original pointe toutefois à l’horizon.
J’espère que le dur labeur estudiantin t’apporte toutes les satisfactions méritées par la sueur versée.
Je suis, moi, à nouveau fureteur à la Bibliothèque nationale pour des projets de réédition d’œuvres traitant de l’histoire des localités sous la Révolution française, nouvelle collection dont je dois m’occuper.
J’ai hâte de vous revoir, toi et ton compagnon. Dès que je suis en possession du vieux bouquin, je t’appelle pour convenir d’un rendez-vous.
Bon courage et à très bientôt.
Très amicalement.
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Jeudi 24 février
Vu hier soir Bernard Tapie, premier invité des Coulisses du destin, la nouvelle émission du journaliste Guillaume Durand. Quel personnage, mazette ! Sa dextérité à communiquer à travers les médias est presque fascinante. Comme ces gros mammifères marins prodigieusement agiles dans leur milieu naturel, la belle bête Tapie développe son aura et navigue sur la crête médiatique laissant les pâlots du petit écran comme de gourdiflots jobards.
Par contraste, Durand, le rebelle de la mèche, n’offre qu’une bouille d'albâtre suant, d’un esthétisme douteux, et gère tout juste sa propre angoisse ; Philippe Tesson du Quotidien de Paris, venu s'essayer à la contradiction avec le Bernard, semble avoir été déterré pour l'occasion et doit faire très peur aux petits enfants. Le couffin issu d’une union entre le journaliste et notre vieux Fanfan, bien que je soupçonne l’absence totale d’attirance entre les deux vestiges, aurait toutes les chances de remporter le grand prix d'Avoriaz. Voilà, c'était pour rire un peu.

Samedi 26 février
En partance pour Au, chargé d'un fatras de formulaires fiscaux pour les déclarations de la sci et de ses huit associés.
Actuellement, jeux olympiques d'hiver de Lillehammer. Le Ministre des sports, selon ses tendances caractérielles et son état de santé, doit bouillir de l'adrénaline ou faire sous lui. Pauvre vieux ! Ses athlètes du froid, de la poudreuse à la patinoire, se ramassent avec l'obstination du suicidaire, laissant toutes les médailles pendre à d'autres cous. Ne leur reste que du chocolat amer à grignoter. Sitôt les jeux clos, les frictions d'oreilles vont être au programme.
Jean Sablon est mort. Le premier chanteur français à s'aider du micro traînait une grave maladie. Ainsi s'est couché Syracuse...

Dimanche 27 février
Terrible journée. Heïm va très mal, tant physiquement que psychologiquement. Les problèmes financiers commencent à s'étendre à la sci, qui risque de ne pas pouvoir honorer ses engagements. Autant dire que Heïm est touché directement dans sa chair. Entre les échéances de fin de mois d'Histodif, les apports à faire à Reprographie du Santerre, et les obligations personnelles (sci, impôts, nourriture...) il va falloir faire des choix forcément douloureux.
Dans la Peugeot 505 nous amenant à la gare de Laon, Alice, Hermione, Karl et moi ne soufflons mot, chacun à son désespoir et à ses inquiétudes. Peut-être aurais-je préféré que Heïm me cassât la gueule... la tension eut été moins insupportable.
Heïm est, à chaque instant, en danger de mort. Les malaises cardiaques, le sucre, la tension : les manifestations et les taux atteignent fréquemment des extrêmes qui tueraient tout individu normalement constitué. Malgré les myriades d'épreuves, la volonté de vivre est chez Heïm plus puissante que tout. Ce soir, pourtant, nous avons senti un mélange de lassitude furieuse et d'une combativité prête à la plus ultime des solutions : se faire sauter la cervelle, si le déshonneur est trop grand. A quel degré de malheurs va nous conduire l'apparente déliquescence inéluctable de la vie. Et si nous, enfants de sang ou rapportés, ne pouvions vivre à hauteur d'homme. Que va-t-il advenir ? Combien de temps Heïm va-t-il supporter et résister ? Quelles solutions à trouver et à mettre en œuvre ? Résisterons-nous aux attaques extérieures et à notre propre médiocrité, lorsque Heïm rejoindra le Christ de la propriété ? Larmes aux yeux et grosse boule à la place de la luette, je ne peux extirper de mon esprit ces interrogations.
Connard à mon niveau, englué dans mes insondables bêtises, je reste tourmenté avec mes petits moyens.
La propriété d'Au, alors que nous venons de quitter définitivement le château d'O, inspire de plus en plus de mauvaises choses à Heïm. Sentiment d'isolement absolu, constatation d'une désobéissance accrue de collaborateurs incompétents et inefficaces à produire autre chose que du vent ; seule Hermione répond correctement aux attentes de Heïm.
Sombres perspectives...
Nous faisions le bilan des 17 années passées à O : richesse et pauvreté, bonheurs et malheurs, unions et séparations. Les affaissements de terrain se font de plus en plus fréquents, les arbres sont déracinés par les tempêtes comme jamais... l’automutilation s'accroît, comme si nous devions rester à jamais ses derniers hôtes.


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Mlle Nadette M.
[...]
Edimbourg Ehkidd
Ecosse
Paris, le 28 février 1994
Dear amie,
C'est sous les loupiotes vertes de la Bibliothèque nationale que je salis ce papier.
J'ai eu votre message, sur mon croulant répondeur, m'évoquant votre week-end avant l'envol vers nos bien-aimés voisins écossais. Pour moi, ces deux jours ont plutôt été terribles, encombrés de multiples soucis.
Je ne suis point dans une turbulence jouissive, d'autant plus après ce que je viens de lire. Je vous avais promis de chercher un ouvrage traitant de Lyon sous la période révolutionnaire, voilà qui est fait : l'œuvre, parue en 1883, émane du Baron Raverat. Ce qu'il rapporte me conforte dans l'idée que NOUS, FRANCAIS, n'avons rien à envier aux NAZIS & FACHOS de tous poils dont on nous bassine les oreilles. Nos horreurs, notre barbarie équivalent pour le moins leur génocide.
Voici les faits rapportés qui ont eu lieu, au nom des Droits de l'homme, il y a deux cents ans, ce qui ne représente même pas l’addition de trois existences complètes.
Guillin-Dumontel, vieux gouverneur des lieux, s'était à maintes reprises battu, pour défendre son peuple et son royaume, et en gardait des traces physiques. Les vermines révolutionnaires s'obstinèrent à vouloir éliminer leur dirigeant, non comme des guerriers ennemis et loyaux, mais comme des bêtes atroces de barbarie.
Le gouverneur, réfugié dans son château avec sa femme et ses enfants, tua les premiers avant d'être atteint au front. Transporté par quelques officiers municipaux, la foule enragée et baveuse ne voulu pas le laisser tranquille dans son agonie : un coup de fourche par un cul terreux de Couzon, « un vieux paysan lui abat l'épaule du tranchant de sa faux, chacun lui veut plonger son sabre dans la gorge ; (...) on répète qu'on égorgera comme lui sa femme et ses enfants pour éteindre cette infâme race. [Ecrit en 1887, n'est-ce pas le propre d’un génocide ?] ; un jeune homme de Curis, plus humain que les autres, l'achève d'un coup de hache. »
Là commence l'inconcevable horreur qui rendrait presque guimauve les camps de la mort, et enfants de cœur leurs animateurs : « Guillin est à peine mort, que ses bourreaux se précipitent, dépècent le cadavre ; ils s'en partagent les lambeaux, les uns lavent dans son sang leurs mains noires de poudre ; d'autres, chose incroya­ble ! y trempent leurs lèvres altérées ; on arrache les oreilles, les entrailles fumantes de la victime, on s'en décore en guise de trophées et de cocarde ; enfin, on emporte sur une pique la tête détachée du tronc pour la faire figurer à je ne sais quel indescriptible festin qui se prépare à Chasselay. »
Tous ces détails ont été scrupuleusement rapportés dans la procédure qui fut instruite à Lyon après l'événement.
Taine, historien a priori sérieux, a narré l'épisode du festin où ces innommables ont dévoré le cœur et les chairs de l'écharpé gouverneur.
Voilà sur quoi repose notre régime démocratique... Vive la République ! Vive la France !
Pardon pour la noirceur de mon propos.
Au plaisir de retrouver votre pétillance.
Votre ami.
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